Mort numérique ou éternité virtuelle : quel est le sort des données personnelles après le décès de l’internaute? La toute récente loi pour une République numérique reconnait la mort numérique et permet à chacun de donner des directives sur le sort à donner à ses comptes internet après sa disparition.
Votée le 7 octobre dernier, la loi pour une République Numérique apporte un cadre au traitement des données numériques après la mort de leur propriétaire. Un décret viendra compléter l’oeuvre du législateur. La notion de mort numérique développée dans ce texte comporte des enjeux majeurs. D’après les données de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) 1% des profils Facebook appartient à des personnes décédées, soit au total 13 millions de profils.
Un sujet largement inexploré
La question du devenir des données personnelles après le décès de l’intéressé est nouvelle. Et le droit applicable actuel est lacunaire. L’article 40 de la Loi Informatique et Libertés de 1978 autorise les héritiers justifiant de leur identité à exiger cette actualisation et la prise en compte du décès, si des éléments portés à leur connaissance leur laissent présumer que les données personnelles du défunt n’ont pas été mises à jour. La portée de ce dispositif est très limitée, puisque les intéressés ne disposent d’aucun droit d’accès particulier aux comptes du défunt et peuvent seulement agir si « un élément est porté à leur connaissance ». Aucune conséquence juridique n’est attachée à la prise en compte du décès puisque les héritiers ne peuvent à ce titre obtenir la fermeture du compte concerné.
Des initiatives privées
De nombreux opérateurs numériques se sont emparés du sujet de la mort numérique pour proposer leurs propres solutions. Certains prévoient dans leurs conditions générales d’utilisation une clause d’intransmissibilité à cause de mort de tous les droits reconnus au titulaire du compte. Facebook, Google, Twitter ou Instagram ont prévu des dispositifs spécifiques. Il peut s’agir d’une fonctionnalité d’accès au compte d’une personne décédée ou d’une fonctionnalité de signalement de ce décès. Facebook offre à ses utilisateurs la possibilité de décider de la conversion de leur page personnelle en page d’hommage s’ils venaient à décéder.
Des droits personnels non transmissibles
Désormais la loi précise expressément que les droits d’opposition d’accès et de rectification des données s’éteignent au décès de leur titulaire. Il s’agit des droits personnels non transmissibles et non de droits patrimoniaux.
Le texte permet à chacun d’adopter des directives relatives à la conservation, à l’effacement et à la communication de ses données personnelles après son décès. Ces directives, révocables ou modifiables à tout moment, peuvent soit avoir une vocation générale et s’appliquer à tous les traitements portant sur les données personnelles de l’intéressé, soit avoir une vocation spéciale et ne concerner que les traitements nommément désignés. Les directives générales peuvent être enregistrées auprès d’un tiers de confiance numérique certifié par la Cnil et les directives spécifiques auprès de chacun des responsables de traitement concernés. Il est possible de désigner une personne pour exécuter ces directives. A défaut, cette mission échoit aux héritiers du défunt.